La
Cellule
Tous les organismes
sont constitués d’une ou plusieurs cellules, unités élémentaires dont la taille
est de quelques dizaines de micromètres (rappelons que le micromètre (mm) est
le millième de millimètre (10-3 mm). Bien inférieure au pouvoir séparateur de
notre œil, cette petite taille des cellules explique qu’elles n’aient pu être
observées avant l’invention du microscope au XVIIIe siècle. Les bactéries, les
protozoaires comme l’amibe ou la paramécie sont des organismes unicellulaires,
les plantes (à l’exception de certains champignons comme les levures ou de
certaines algues comme les diatomées) et les animaux sont des organismes
pluricellulaires.
L’essentiel de ce
que nous savons aujourd’hui sur la cellule a été acquis depuis 1955; à cette
époque ont été mises au point les méthodes permettant l’observation au
microscope électronique de coupes minces de cellules dont l’épaisseur est
inférieure à 100 nanomètres (un nanomètre est le millième de micromètre,
autrement dit 1 nm = 10-6 mm). C’est ainsi qu’ont été découverts les détails de
l’anatomie cellulaire, détails que le microscope à lumière permet de voir et
qui constituent l’ultrastructure de la cellule. Simultanément les techniques de
fractionnement ont permis, à partir de populations cellulaires (cellules en
culture, fragments d’organes), d’isoler des fractions ne contenant qu’une
catégorie d’organites ; dans ces conditions on peut analyser la composition
chimique des organites et même dans certains cas étudier leur fonctionnement
hors de la cellule. À ce développement rapide des connaissances ont collaboré
les cytologistes, les biochimistes, les biologistes moléculaires, les
généticiens, les physiologistes, si bien que la biologie cellulaire est devenue
un des thèmes les plus importants de la biologie fondamentale.
Malgré la diversité
des êtres vivants, les cellules ont des caractères anatomiques, biochimiques et
fonctionnels communs. Les pièces qui les composent sont très semblables comme
le sont également les molécules porteuses de leur information ou celles qui
interviennent dans les conversions d’énergie et permettent à la cellule
d’effectuer des travaux variés. Pour leur croissance, pour leur reproduction
par division, pour la régulation de leurs activités, les cellules mettent en
jeu les mêmes types de mécanismes. Cette unité du monde vivant à l’échelle
cellulaire est l’héritage d’une longue évolution commencée il y a 4,5 milliards
d’années avec la formation de la Terre, évolution qui a conduit à l’apparition
des premiers organismes unicellulaires il y a 3,5 milliards d’années et qui
s’est poursuivie jusqu’à maintenant.
1.
L’anatomie cellulaire
Quel que soit
l’organisme auquel elles appartiennent, les cellules sont formées de pièces qui
remplissent des fonctions spécialisées tout comme les organes d’un être
complexe, c’est pourquoi on les appelle organites cellulaires. L’étude
anatomique des cellules faite à l’échelle la plus fine, grâce en particulier au
microscope électronique, révèle que les organites ont une structure
caractéristique qui est en quelque sorte leur photo d’identité; les analyses
biochimiques et biophysiques révèlent la nature des molécules qui composent les
organites et, pour nombre d’entre eux, on connaît la disposition spatiale de
leurs molécules, c’est-à-dire leur architecture moléculaire.
Au centre de la
cellule existe une région où est rassemblée la majorité des informations
qu’elle utilise au cours de son existence, c’est le noyau qui est entouré par
le cytoplasme. Chez les bactéries et les cyanobactéries, noyau et cytoplasme ne
sont pas séparés par une frontière; ces organismes dont les cellules ont un
noyau primitif ou nucléoïde sont les procaryotes. Chez les animaux et les
végétaux, une enveloppe nucléaire sépare le noyau du cytoplasme; ces organismes
dont les cellules ont un noyau individualisé sont les eucaryotes.
Cellules
procaryotes: bactéries et cyanobactéries
Une bactérie comme
le colibacille (Escherichia coli ) est une cellule qui a la forme d’un bâtonnet
cylindrique aux extrémités arrondies; elle mesure 2,5 mm de long et 0,8 mm de
diamètre (fig. 1 a et 1 b).
Cette cellule est
enfermée à l’intérieur d’une boîte rigide ou paroi qu’elle a elle-même
synthétisée et qui est formée par l’association complexe de polypeptides, de
polysaccharides et de lipides. La paroi de 10 nm impose sa forme à la bactérie,
elle représente donc un squelette à l’échelle cellulaire appelé cytosquelette
qui est ici extérieur à la cellule.
Le colibacille est
limité à sa périphérie par une couche continue de 7,5 nm d’épaisseur qui est sa
membrane plasmique, membrane qui isole un compartiment intracellulaire –
l’intérieur de la cellule – du milieu extracellulaire. Constituée de lipides et
de protéines cette membrane est l’organite cytoplasmique qui contrôle les
échanges qu’a la bactérie avec l’environnement dans lequel elle vit: contenu de
l’intestin humain par exemple, milieux d’eau douce variés. Le reste du
cytoplasme est constitué d’un milieu visqueux riche en protéines, le cytosol,
dans lequel baignent plus de 10 000 particules de 25 nm de diamètre; ces
particules, ou ribosomes, sont formées d’acides ribonucléiques, les ARN
ribosomiques (ARNr), qui sont associés à des protéines. Les ribosomes sont les
organites cytoplasmiques qui synthétisent les chaînes polypeptidiques des
protéines.
Le nucléoïde qui occupe
la région centrale de la cellule est formé d’un filament de 2 nm de diamètre et
de 1,2 mm de long; ce filament, refermé sur lui-même et reployé de nombreuses
fois, est une molécule circulaire d’acide désoxyribonucléique (ADN) qui porte
l’essentiel de l’information cellulaire: cet organite nucléaire est le
chromosome bactérien, chromosome qui est relié à une invagination de la
membrane plasmique appelée mésosome. À l’ADN chromosomique sont associées des
protéines qui catalysent et régulent la synthèse des molécules d’ARN ou de
nouvelles molécules d’ADN.
Le chromosome n’est
pas le seul organite porteur d’informations. Il existe en effet dans le
cytoplasme des bactéries comme le colibacille de petites molécules d’ADN
circulaire de quelques microns de circonférence; ce sont les plasmides. Les
plasmides étant en général tous identiques, l’information extrachromosomique
qu’ils portent est donc présente en plusieurs exemplaires dans la cellule,
alors que l’information chromosomique n’est représentée qu’à un seul
exemplaire.
Pour croître et se
multiplier, le colibacille doit puiser dans le milieu qui l’environne des sels
minéraux et des molécules organiques comme le glucose; ces molécules lui
servent à la fois de matériaux de construction et de source d’énergie. De tels
organismes qui ont besoin de molécules organiques comme source de carbone sont
dits hétérotrophes. Il existe des bactéries qui synthétisent leurs molécules
organiques à partir du gaz carbonique et de l’azote, l’énergie nécessaire à ces
synthèses étant fournie par la lumière selon un mécanisme complexe qui est la
photosynthèse. Ces organismes qui n’ont pas besoin de molécules organiques
comme source de carbone sont dits autotrophes.
Les bactéries
photosynthétiques possèdent des organites cytoplasmiques originaux,
responsables de leur caractère autotrophe: il s’agit de membranes de 6 nm
d’épaisseur qui délimitent des cavités closes: les thylakoïdes. Selon les
espèces, les thylakoïdes forment des vésicules de 50 nm de diamètre ou des sacs
aplatis. La membrane des thylakoïdes est constituée de lipides et de protéines
différents de ceux de la membrane plasmique et, de plus, elle renferme des
pigments dont une variété de chlorophylle, qui captent l’énergie lumineuse; ce
type de membrane isole du cytosol un compartiment qui est l’espace
intrathylakoïde.
Une cyanobactérie
comme l’oscillaire est un organisme photosynthétique pluricellulaire qui vit
dans l’eau des mares; c’est un filament cylindrique de 4 mm de diamètre et de
plusieurs centaines de microns de long qui est constitué de cellules identiques
placées bout à bout. Chaque cellule, limitée par une membrane plasmique, est
enfermée dans une paroi de composition semblable à celle du colibacille et, en
outre, la surface latérale de la paroi est recouverte extérieurement d’une
couche de mucilage de 50 nm d’épaisseur (fig. 1 c). Ce mucilage est riche en
polysaccharides qui, comme les constituants de la paroi, sont synthétisés par
la cellule. Des thylakoïdes à disposition concentrique sont situés à la périphérie
du cytoplasme, leur membrane renferme de la chlorophylle et d’autres pigments
qui donnent aux cellules une couleur bleue, d’où le nom d’algue bleue qui était
donné à ces organismes (aujourd’hui le terme d’algue est réservé à des végétaux
eucaryotes).
Les ribosomes des
cellules d’oscillaire sont situés entre les thylakoïdes périphériques et le
nucléoïde central, nucléoïde formé d’un chromosome sans doute circulaire et de
3 mm de circonférence. Le cytosol renferme des plasmides et des inclusions qui
sont des réserves intracellulaires de nature chimique variée: gouttelettes de
lipides, corps protéiques.
Cellules
eucaryotes animales et végétales
Cellule animale
Les fibroblastes
humains (fig. 2) sont les cellules spécifiques du tissu conjonctif comme le
derme de la peau, le chorion du tube digestif, les tendons ou la paroi des
veines et des artères; ce sont des cellules isolées qui baignent dans le milieu
extracellulaire contenant de nombreuses fibres protéiques de collagène et
d’élastine ainsi que des macromolécules complexes – les protéoglycanes –
formées de chaînes polypeptidiques auxquelles sont attachées de longues chaînes
polysaccharidiques sulfatées. Toutes ces molécules qui sont synthétisées par
les fibroblastes donnent au tissu conjonctif ses propriétés mécaniques
d’élasticité et de résistance à l’extension: cf. matrice INTERCELLULAIRE. Un
fibroblaste a la forme d’un fuseau en périphérie duquel s’étendent divers
prolongements. Le corps cellulaire mesure 20 mm de long sur 5 mm de diamètre
environ, les prolongements de longueur variée ont un diamètre souvent inférieur
au micromètre. Le noyau fusiforme occupe la région centrale et comme chez les
procaryotes, le compartiment cellulaire est limité par une membrane plasmique
de 7,5 nm d’épaisseur (fig. 2).
L’anatomie de cette
cellule est tout d’abord caractérisée par la présence dans son cytoplasme de
différents types de membranes qui isolent du cytosol des compartiments clos,
membranes et compartiments représentant autant d’organites originaux. Les
membranes du réticulum endoplasmique (6 nm d’épaisseur) délimitent un ensemble
de cavités ou citernes qui communiquent entre elles et forment un réseau
spongieux à l’intérieur du cytoplasme (d’où le nom qui a été donné à cet
organite). Une portion du réticulum entoure le noyau, c’est l’enveloppe
nucléaire, qui marque la frontière entre le noyau et le cytoplasme; cette
frontière n’est pas continue car elle est fenestrée de place en place par des
perforations de 50 nm de diamètre qui sont les pores nucléaires.
De nombreux
ribosomes sont attachés aux membranes de réticulum de cette cellule et leur
donnent un aspect grenu (fig. 3), d’où le nom de réticulum endoplasmique
rugueux attribué à ce type de réticulum (on l’appelle aussi ergastoplasme). Les
chaînes polypeptidiques qui sont synthétisées par ces ribosomes sont
transférées dans les cavités du réticulum ou insérées dans les membranes. Les
portions de réticulum dont les membranes sont dépourvues de ribosomes
constituent le réticulum endoplasmique lisse, type de réticulum qui est peu
abondant dans le fibroblaste.
Les membranes de
l’appareil de Golgi (7 nm d’épaisseur et toujours dépourvues de ribosomes)
isolent des cavités dont l’arrangement est beaucoup plus ordonné que le réseau
polymorphe du réticulum endoplasmique. Il s’agit de disques aplatis ou saccules
qui sont empilés les uns sur les autres; chaque pile est un dictyosome et
compte 3 à 4 saccules de 1 mm de diamètre environ; au nombre d’une dizaine, les
dictyosomes sont groupés près du noyau. Une des faces des dictyosomes est en
regard de certaines régions du réticulum, c’est leur face externe, la face
opposée étant leur face interne.
De part et d’autre
des dictyosomes existent deux populations de vésicules de 20 nm de diamètre:
des vésicules de transition situées entre les dictyosomes et des citernes de
réticulum, des vésicules de sécrétion situées au voisinage de l’autre face des
dictyosomes. Ces deux populations de vésicules témoignent de la structure
dynamique des dictyosomes: de nouveaux saccules se forment à la gace externe
par fusion de vésicules de transition qui ont bourgeonné à partir du réticulum,
en même temps que des saccules disparaissent à la face externe en se
fragmentant en vésicules de sécrétion.
Les membranes du
réticulum endoplasmique contiennent des enzymes dont certaines catalysent la
synthèse de certains lipides membranaires, d’autres la liaison covalente de
sucres à des molécules variées, c’est-à-dire qu’elles catalysent des réactions
du glycosylation, d’autres enfin, qui inactivent des substances toxiques pour
la cellule et interviennent donc dans les détoxifications. Les membranes de
l’appareil de Golgi interviennent elles aussi dans des réactions de
glycosylation et de plus dans la sulfatation de certaines molécules auxquelles
sont ainsi liés de façon covalente des groupements sulfate.
Les cavités du
réticulum forment des compartiments où s’accumulent des molécules destinées à
être exportées dans le milieu extracellulaire ou à être stockées dans d’autres
compartiments intracytoplasmiques. Après avoir été synthétisées par les
ribosomes du réticulum rugueux et transférées dans ses cavités, les chaînes
polypeptidiques du collagène, de l’élastine et des protéoglycanes cheminent
dans ce réseau cavitaire jusqu’aux régions situées en regard des dictyosomes;
là elles quittent le réticulum dans les vésicules de transition, elles
transitent dans un saccule de la face externe d’un dictyosome jusqu’à sa face
interne où elles sont alors emballées dans des vésicules de sécrétion. Au cours
de ce cheminement intracellulaire les chaînes polypeptidiques sont toujours
séparées du cytosol par une membrane (d’abord du réticulum puis de l’appareil
de Golgi) et de plus elles sont modifiées chimiquement, les réactions étant
catalysées par des enzymes situées dans les cavités que limitent les membranes
de ces organites. Les vésicules de sécrétion sont emportées vers la périphérie
du fibroblaste et leur contenu est alors déchargé dans le milieu
extracellulaire par fusion de leur membrane avec la membrane plasmique selon un
processus appelé exocytose. Dans le milieu extracellulaire, les molécules de
collagène ou d’élastine s’associent entre elles en formant les fibres du tissu
conjonctif.
Dans le cytoplasme
du fibroblaste existent également d’autres organites limités par des membranes
et qui sont en fait des productions du réticulum endoplasmique ou de l’appareil
de Golgi. Il s’agit tout d’abord de vésicules de 0,1 mm de diamètre, limitées
par une membrane de 6 nm d’épaisseur qui isole une matrice; dispersées dans le
cytosol, ces vésicules renferment des enzymes qui catalysent la production et
la décomposition de l’eau oxygénée, c’est-à-dire le peroxyde d’hydrogène; ces
organites sont les peroxysomes. D’autres vésicules de diamètre varié (0,2 mm à
2 ou 3 mm) limitées par une membrane de 7 nm d’épaisseur contiennent un mélange
d’hydrolases, enzymes qui catalysent à pH acide le clivage de molécules variées
avec intervention de molécules d’eau; ces organites sont les lysosomes qui
permettent au fibroblaste de digérer les molécules qu’il capture dans le milieu
extracellulaire.
Les peroxysomes
proviennent de bourgeons qui se détachent du réticulum endoplasmique; les
enzymes de leur matrice sont synthétisées pour une part au niveau de ribosomes
liés aux membranes du réticulum, pour une autre part au niveau de ribosomes
libres dans le cytosol et transférées après leur synthèse dans la matrice. Les
lysosomes sont bourgeonnés par les bords des saccules golgiens, leurs
hydrolases étant synthétisées par des ribosomes du réticulum rugueux; ces enzymes
empruntent au départ la même voie de cheminement que les chaînes
polypeptidiques destinées à l’exportation, mais elles sont ensuite aiguillées
différemment.
Les mitochondries
représentent un dernier type d’organite cytoplasmique à structure membranaire.
Au nombre d’une centaine dispersées dans le cytosol, les mitochondries du
fibroblaste ont la forme de bâtonnets cylindriques aux extrémités arrondies
dont le diamètre est de 0,5 mm et la longueur de 2 à quelques micromètres (fig.
3). Chaque mitochondrie est séparée du cytosol par une membrane de 6 nm
d’épaisseur qui est la membrane mitochondriale externe; cette membrane est
doublée intérieurement d’une membrane mitochondriale interne également de 6 nm
d’épaisseur et qui forme des replis appelés crêtes mitochondriales. Les deux
membranes mitochondriales isolent deux compartiments: l’un situé entre les deux
membranes externe et interne qui est l’espace intermembranaire, un autre limité
par la membrane interne qui est la matrice mitochondriale. Les mitochondries
régénèrent le fournisseur universel d’énergie pour la cellule: l’adénosine
triphosphate ou ATP; l’hydrolyse de ce nucléotide donne de l’adénosine
diphosphate ou ADP, de l’acide phosphorique et de l’énergie, énergie qui est
utilisée pour des travaux cellulaires de nature variée: synthèse de molécules,
production du mouvement, transport d’ions d’un compartiment à l’autre par
exemple. La régénération des molécules d’ATP se fait par phosphorylation de
l’ADP en ATP; cette phosphorylation nécessite un apport énergétique qui est
fourni cette fois par l’oxydation de combustibles organiques surtout
glucidiques ou lipidiques. Les oxydations se déroulent principalement dans la
matrice mitochondriale qui contient de nombreuses enzymes catalysant ces
réactions; le couplage énergétique de ces réactions d’oxydation à la
phosphorylation de l’ADP est la phosphorylation oxydative: elle se fait au
niveau de la membrane mitochondriale interne et met en jeu des protéines
spécifiques de cette membrane.
Outre les organites
à membranes et les nombreux ribosomes dispersés dans le cytosol ou associés aux
membranes du réticulum endoplasmique, existent dans le cytoplasme des
structures filamenteuses qui interviennent dans le maintien de la forme du
fibroblaste et dans les mouvements de cette cellule; ces structures forment un
cytosquelette intracellulaire comprenant trois types d’organites: des
microtubules, des filaments d’actine et des filaments intermédiaires.
Les microtubules
sont des tubes cylindrique de 25 nm de diamètre et dont la paroi mesure 5 nm
d’épaisseur; les uns sont courts (0,3 mm) et associés par groupes de 3 comme
les génératrices d’un cylindre: ce sont les deux centrioles qui sont constitués
chacun de 9 groupes de 3 microtubules; les autres sont longs (de 3 mm à 10 mm)
et isolés, ils ont une disposition rayonnante à partir de la région
péricentriolaire et s’étendent jusque dans les prolongements cytoplasmiques du
fibroblaste. La paroi des microtubules est constituée de protéines globulaires
appelées tubulines.
Les filaments
d’actine, d’un diamètre de 5 nm et de plusieurs microns de long sont pour la
plupart groupés en faisceaux ou câbles présents dans le corps cellulaire et
aussi dans les prolongements périphériques où leur orientation est parallèle à
celle des microtubules. L’actine qui compose ces filaments est une protéine
globulaire.
Les filaments
intermédiaires ont un diamètre de 10 nm, diamètre compris entre celui des
microtubules et celui des filaments d’actine. Dans le fibroblaste ces filaments
sont formés de vimentine, qui est une protéine fibreuse; ils forment un lacis
situé principalement autour du noyau qu’il maintiennent au centre de la
cellule.
L’enveloppe
nucléaire qui délimite le noyau sépare deux milieux riches en protéines: le
cytosol et le nucléoplasme. Dans le nucléoplasme baignent des filaments de 10
nm de diamètre appelés nucléofilaments qui sont les chromosomes du fibroblaste,
organites portant l’essentiel de l’information cellulaire. Chez l’homme, les
chromosomes sont au nombre de 46 et mis bout à bout les 46 nucléofilaments ont
35 cm de long. Chaque chromosome est constitué d’une molécule d’ADN linéaire à
laquelle sont associées des protéines de deux types: les unes condensent l’ADN
en édifice plus compact, le nucléofilament, ce sont les histones (en absence
d’histones, les 46 molécules d’ADN ont une longueur totale de 2 m environ), les
autres catalysent la synthèse de molécules d’ARN ou la synthèse de nouvelles
molécules d’ADN.
Les nucléofilaments
sont plus ou moins condensés et enchevêtrés dans le noyau et forment ainsi des
masses fibreuses visibles au microscope à lumière appelée chromatine; selon son
état de compaction on distingue la chromatine condensée et la chromatine
diffuse.
Le noyau renferme
de nombreuses particules ribonucléoprotéiques ou particules RNP dont le
diamètre est compris entre 5 nm et 20 nm. L’ARN des particules RNP est
synthétisé au niveau des chromosomes; leurs protéines viennent du cytoplasme où
elles sont synthétisées par les ribosomes libres. Les particules RNP qui s’assemblent
dans le noyau sont ensuite exportées dans le cytoplasme en passant à travers
les pores de l’enveloppe nucléaire. Il existe une catégorie de particules RNP
qui sont produites en grande quantité dans le noyau, ce sont les préribosomes,
particules précurseurs des ribosomes cytoplasmiques. Les préribosomes sont
stockés transitoirement dans le noyau avant leur exportation, ce stock forme
une masse particulaire sphérique de 1 mm de diamètre: le nucléole. En plus des
chromosomes nucléaires, le fibroblaste possède d’autres structures porteuses
d’information qui sont localisées dans la matrice des mitochondries; il s’agit
de petites molécules d’ADN circulaires de 5 mm de circonférence: les molécules
d’ADN mitochondrial ou ADNmt. Dans sa matrice chaque mitochondrie renferme 3 à
5 molécules d’ADNmt et également des ribosomes différents de ceux du
cytoplasme; ces ribosomes ou mitoribosomes synthétisent certaines des chaînes
polypeptidiques de la membrane mitochondriale interne.
Cellule végétale
Une cellule de parenchyme
palissadique d’une feuille d’épinard (fig. 4) est de forme prismatique et
mesure 60 mm de haut et 20 mm de large. Elle est enfermée à l’intérieur d’une
paroi rigide de 0,1 mm d’épaisseur; cette paroi riche en polysaccharides est un
cytosquelette extracellulaire dont les constituants sont synthétisés par la
cellule elle-même; elle est formée de fibrilles de cellulose disposées
parallèlement à la surface cellulaire et dont les diamètres sont compris entre
3,5 mm et 10 mm. Ces fibrilles sont enrobées dans une matrice formée
d’hémicellulose et de substances pectiques (cf. DIFFÉRENCIATION CELLULAIRE -
Cytodifférenciation végétale). La cellule est limitée par une membrane
plasmique plaquée contre la face interne de la paroi; toute la partie centrale
du cytoplasme est occupée par un lysosome volumineux et très hydraté qui est la
vacuole. Les autres organites cellulaires sont situés en périphérie, entre la
membrane de la vacuole appelée tonoplaste et la membrane plasmique: réticulum
endoplasmique rugueux et lisse, ribosomes libres ou attachés aux membranes du
réticulum, dictyosomes de l’appareil de Golgi, mitochondries, peroxysomes,
noyau avec son enveloppe nucléaire et contenant de la chromatine ainsi que un
ou deux nucléoles (fig. 4).
Le cytosquelette
intracellulaire comprend des microtubules et des filaments d’actine localisés
principalement sous la surface cellulaire. Comme la plupart des cellules
végétales, cette cellule de parenchyme palissadique ne possède pas de
centrioles, elle renferme des organites originaux qui contiennent de la
chlorophylle: les chloroplastes, au nombre d’une centaine.
Chaque chloroplaste
est un disque lenticulaire de 5 ou 6 mm de diamètre et de 2 mm d’épaisseur dans
sa partie centrale; il est limité par une enveloppe formée de deux membranes
concentriques (fig. 5). L’enveloppe isole un compartiment qui est le stroma du
chloroplaste, stroma contenant des thylakoïdes dont la membrane a 7 nm
d’épaisseur. Les thylakoïdes sont orientés parallèlement au grand axe du
chloroplaste et certains sont empilés; chaque pile est un granum et on compte
40 à 60 granums par chloroplaste. La membrane des thylakoïdes contient de la
chlorophylle et des pigments qui donnent aux feuillets leur couleur verte.
Grâce à leurs chloroplastes, les cellules du parenchyme réalisent la
photosynthèse ; l’énergie lumineuse captée au niveau des thylakoïdes permet la
réduction du gaz carbonique et d’autres composés minéraux en molécules
organiques, par exemple des molécules d’amidon qui sont stockées temporairement
sous forme de grains d’amidon dans le stroma.
Le stroma contient
des molécules d’ADN circulaire de 50 mm de circonférence et qui sont au nombre
d’une vingtaine par chloroplaste: ce sont les molécules d’ADN chloroplastique ou
ADNct; de plus le stroma renferme des plastoribosomes différents de ceux du
cytoplasme et des mitoribosomes; les plastoribosomes synthétisent des chaînes
polypeptidiques de la membrane des thylakoïdes et certaines enzymes du stroma.
Cette cellule végétale possède donc deux types de structures
extrachromosomiques porteuses d’information: les molécules d’ADNmt situées dans
la matrice des mitochondries et les molécules d’ADNct situées dans le stroma
des chloroplastes.
Les cellules du
parenchyme communiquent entre elles par des ponts cytoplasmiques qui traversent
leur paroi: les plasmodesmes au nombre de plusieurs milliers par cellule;
certains plasmodesmes renferment un tube de réticulum endoplasmique lisse qui
passe d’une cellule à sa voisine.
L’étude anatomique
de cellules comme celles qui ont été décrites plus haut montre que les
organites qui les composent ne sont pas d’une grande variété puisqu’on en
compte moins d’une vingtaine. Malgré leur diversité, les cellules ne sont que
des variations sur deux grands thèmes: le thème procaryote et le thème
eucaryote; ces deux thèmes ont d’ailleurs des points communs puisque la
membrane plasmique, les chromosomes, les ribosomes sont des organites qui
existent dans toutes les cellules et que les thylakoïdes sont caractéristiques
des cellules photosynthétiques possédant de la chlorophylle, qu’elles soient
procaryotes ou eucaryotes.
2.
Les édifices moléculaires fondamentaux
À l’échelle
moléculaire existe également une unité architecturale; on peut en effet classer
les édifices moléculaires qui constituent les organites en trois ensembles
caractérisés chacun par la nature des molécules qui les composent et par
l’assemblage de ces molécules entre elles. Ce sont les membranes cellulaires,
les structures fibreuses du cytosquelette intracellulaire et les complexes
nucléoprotéiques des chromosomes et des ribosomes.
Les membranes
cellulaires sont constituées de lipides et de protéines. Les lipides
membranaires ont un pôle hydrophile et un pôle hydrophobe; les plus abondants
sont des phospholipides, des glycolipides et éventuellement du cholestérol. Les
lipides sont disposés en bicouche, les pôles hydrophobes de chaque couche étant
en vis-à-vis, les pôles hydrophiles étant en contact avec les compartiments
aqueux que sépare la membrane (pour la membrane plasmique ces compartiments
sont le cytosol et le milieu extracellulaire).
Les protéines
membranaires sont positionnées au niveau de la bicouche lipidique de façon
différente selon leurs caractères de solubilité; les protéines hydrophiles
(solubles dans l’eau) interagissent avec les pôles hydrophiles des lipides et
sont situées à la périphérie de la bicouche, ces protéines sont dites
périphériques; les protéines hydrophobes (insolubles dans l’eau mais solubles
dans les lipides) sont enchâssées plus ou moins profondément dans la bicouche,
ces protéines sont dites intégrées (fig. 6 a).
Les membranes sont
fluides car leurs lipides comme leurs protéines diffusent dans le plan
membranaire; de plus ce sont des édifices asymétriques: la proportion des
différents phospholipides n’est pas la même dans chaque couche et les
glycolipides sont toujours situés dans une seule des deux couches. Selon leur
nature, les protéines périphériques et intégrées ont une position et une
orientation bien définie par rapport à la bicouche lipidique; quand ce sont des
glycoprotéines leur partie glycosylée (celle qui porte des chaînes glucidiques)
est toujours en regard du même compartiment comme le sont également les parties
glycosylées des glycolipides (dans le cas de la membrane plasmique ce
compartiment est le milieu extracellulaire).
Les membranes
cellulaires se distinguent les unes des autres par leur proportion
lipides-protéines, par celle de leurs différents lipides et par la nature de
leurs protéines. Ces protéines sont responsables des propriétés fonctionnelles
des membranes, propriétés qui dépendent en particulier de leur positionnement
asymétrique dans la bicouche lipidique [cf. MEMBRANES CELLULAIRES].
Les structures
fibreuses du cytosquelette intracellulaire sont des polymères protéiques:
polymères de protéines globulaires pour les microtubules et les filaments
d’actine, polymères de protéines fibreuses pour les filaments intermédiaires
(fig. 6 b). Les microtubules sont constitués de 11 rangées de tubulines
disposées comme les génératrices d’un cylindre, les filaments d’actine sont
formés de 2 chapelets d’actine torsadés. Dans un filament intermédiaire les
molécules sont disposées bout à bout en rangées qui sont décalées l’une par
rapport à l’autre. Selon les types cellulaires, les filaments intermédiaires
sont constitués de vimentine, de desmine, de kératine ou de protéines
spécifiques des cellules nerveuses.
Chaque élément du
cytosquelette est donc un polymère dont l’architecture est précise et
originale. La cellule est capable de dépolymériser ses microtubules et ses
filaments d’actine en dimères de tubulines ou en monomères d’actine globulaire,
dimères et monomères qu’elle peut ensuite repolymériser. Les filaments
intermédiaires ne peuvent être dépolymérisés; quand ils disparaissent, c’est
qu’ils sont digérés par la cellule.
Les complexes
nucléoprotéiques sont formés par l’association d’une ou plusieurs chaînes d’ARN
simple brin à des protéines, c’est le cas des ribosomes, ou par l’assemblage
d’une molécule d’ADN double brin à des histones, c’est le cas des
nucléofilaments chromosomiques des eucaryotes. Un ribosome de colibacille est
constitué de deux sous-unités de taille inégale: la petite et la grosse. La
petite sous-unité comporte une molécule d’ARNr à laquelle sont associées 21
molécules protéiques différentes. Les ribosomes des cellules eucaryotes ont
également deux sous-unités; ceux du cytoplasme sont les mieux connus: leur
petite sous-unité comporte 1 molécule d’ARNr et 33 protéines, la grosse 3 molécules
d’ARNr et 49 protéines. Bien que l’on ne comprenne pas encore dans le détail la
structure tridimensionnelle des sous-unités des ribosomes, on connaît leur
forme générale et les régions où affleurent en surface certaines des protéines;
cette structure tridimensionnelle est extrêmement précise et confère au
ribosome ses propriétés de micromachine-outil qui attache les acides aminés
entre eux et synthétise ainsi des chaînes polypeptidiques; tout changement de
la structure du complexe fait perdre aux ribosomes leurs fonctions.
Dans un
nucléofilament, les histones, qui sont de 4 types, sont associées en octamères
comportant 2 molécules de chaque type; autour d’un octamère est enroulé 1 tour
3/4 d’ADN double brin. Ce complexe est un noyau nucléosomique et le long d’un
nucléofilament se succèdent régulièrement ces noyaux nucléosomiques reliés
entre eux par des segments d’ADN auxquels ne sont pas associés d’histones (fig.
6 c).
L’assemblage des
molécules en édifices d’architecture bien définie se fait dans la cellule selon
deux processus différents: l’insertion de lipides et de protéines dans des
membranes préexistantes, l’auto-assemblage des molécules en polymères
protéiques ou en complexes nucléoprotéiques.
L’insertion des
lipides se fait en même temps qu’ils sont synthétisés par des enzymes de la
membrane plasmique dans les cellules procaryotes ou par des enzymes des
membranes du réticulum endoplasmique dans les cellules eucaryotes. Ces lipides
peuvent ensuite être transférés vers d’autres membranes par des protéines
porteuses du cytosol, par exemple du réticulum endoplasmique vers les membranes
mitochondriales. Une partie des protéines membranaires est insérée au cours de
leur synthèse par des ribosomes attachés à la membrane plasmique des
procaryotes ou aux membranes du réticulum des eucaryotes; les autres protéines
s’associent à la bicouche lipidique des membranes après qu’elles ont été
synthétisées par des ribosomes libres du cytosol. Le positionnement asymétrique
des protéines vers les membranes est une conséquence de leur mode d’insertion
pendant ou après leur synthèse.
L’assemblage des
polymères protéiques et des complexes nucléoprotéiques se fait par
reconnaissance des molécules qui se positionnent les unes par rapport aux
autres comme les pièces d’un puzzle à trois dimensions. En effet ces molécules
ont à leur surface des régions de formes complémentaires appelées sites
stéréospécifiques, sites qui leur permettent de s’associer spontanément en
édifices de géométrie définie. Un tel processus est un auto-assemblage: il ne
met en jeu que les molécules elles-mêmes. C’est évidemment une économie pour la
cellule, puisqu’à partir des matériaux de construction qu’elle synthétise, il
ne lui est pas nécessaire d’utiliser des outils ou des échafaudages pour construire
l’édifice moléculaire. La cellule est néanmoins capable de réguler les
auto-assemblages, en particulier celui des polymères; le positionnement des
premières molécules de tubulines d’un microtubule est favorisé par des
structures encore mal connues que sont les centres organisateurs de la
polymérisation des microtubules; ces centres déterminent l’emplacement et
l’orientation des microtubules dans les cellules eucaryotes. Le matériel qui
entoure les centrioles est un centre organisateur qui induit la polymérisation
de microtubules à disposition rayonnante. L’équilibre actine
globulaire-filament d’actine est sous la dépendance de protéines régulatrices
dont les unes facilitent la polymérisation de l’actine et d’autres la
dépolymérisation des filaments.
3.
L’information cellulaire
Toutes les
structures et toutes les activités des cellules sont définies par un programme
qui correspond à des informations portées par les molécules d’ADN double brin:
molécules d’ADN des chromosomes, plasmides, ADNmt, ADNct. Ces informations sont
les gènes, segments d’ADN dont la séquence des désoxyribonucléotides code pour
une molécule d’ARN; l’ensemble des gènes est le génome de la cellule.
Transcription,
traduction, réplication
L’information
portée par un gène s’exprime par la synthèse de molécules d’ARN simple brin
dont la séquence des bases des ribonucléotides est complémentaire de celle des
bases d’un des brins de l’ADN du gène; cette expression de l’information est la
transcription du gène et selon le gène l’ARN transcrit est soit un ARN messager
(ARNm), soit un ARN ribosomien (ARNr), soit un ARN de transfert (ARNt) (fig. 7
a). Les trois types d’ARN sont utilisés pour la synthèse des chaînes
polypeptidiques des protéines. La séquence des nucléotides d’un ARNm est
traduite en séquence d’acides aminés par les ribosomes qui sont des complexes
ARNr protéines; en fait c’est la séquence de trois nucléotides adjacents ou
codon qui spécifie chaque acide aminé, la table de correspondance entre les 64
codons et les 20 acides aminés étant le code génétique. Lors de la traduction
des ARNm par les ribosomes, les acides aminés doivent être liés chacun à une
molécule d’ARNt qui au niveau du ribosome permet de positionner l’acide aminé
en regard de son codon; ce positionnement se fait grâce à une séquence de 3
nucléotides située au milieu de la chaîne d’ARNt, séquence qui est
complémentaire de celle du codon et qu’on appelle anticodon.
L’expression de
l’information cellulaire par transcription des gènes permet donc la traduction
des ARNm par les ribosomes, c’est-à-dire la synthèse des chaînes
polypeptidiques des protéines, molécules qui sont fondamentales pour la cellule
car ce sont soit des matériaux de construction, soit des enzymes qui catalysent
les réactions biochimiques, soit des régulateurs de l’activité cellulaire.
L’information
cellulaire peut également être copiée puis transmise d’une cellule mère à deux
cellules filles. La copie de l’information se fait par synthèse de deux
molécules d’ADN à partir de chaque molécule d’ADN parental selon un mécanisme
qui est la réplication; les deux molécules ainsi synthétisées sont strictement
identiques à la molécule parentale qui leur a donné naissance (fig. 7 b).
Les deux lots de
molécules d’ADN chromosomique peuvent ensuite être partagés entre deux cellules
filles selon un processus complexe et précis: la division cellulaire. Au cours
de la division les molécules d’ADN extrachromosomiques: plasmide, ADNmt et
ADNct sont réparties au hasard lors de la bipartition, étape finale de la
division (ou cytodiérèse) qui individualisera les deux cellules filles.
Provenant des
divisions successives d’une cellule œuf, les cellules d’un organisme
pluricellulaire celui de l’être humain ont toutes la même information; leurs
génomes sont identiques et pourtant les cellules ne sont pas toutes semblables:
on distingue des fibroblastes, des cellules nerveuses ou neurones, des cellules
musculaires, des globules blancs, etc. Ces différences entre cellules sont dues
au fait que selon les types cellulaires, les gènes qui sont transcrits ne sont
pas tous les mêmes, les gènes qui codent pour le collagène et l’élastine sont
transcrits dans les fibroblastes mais ne le sont pas dans les neurones ou les
globules blancs [cf. PROGRAMME GÉNÉTIQUE].
Au cours de
l’existence d’une cellule, la nature des gènes qui sont transcrits dans cette
cellule, peut-être modifiée. Par exemple, certaines souches de colibacille ne
synthétisent l’enzyme catalysant l’hydrolyse du lactose en galactose et lactose
que si le lactose est présent dans le milieu de culture; en absence de lactose,
la bactérie arrête la transcription de l’ARN, codant pour cette enzyme. Bien
que la régulation de la transcription des gènes soit encore difficile à
comprendre, on sait qu’elle fait intervenir une région adjacente au gène: son
promoteur, qui n’est pas transcrit.
Modifications de
l’information
L’information d’une
cellule peut être modifiée de diverses façons: changement de la séquence
nucléotidique des gènes, introduction d’informations nouvelles gardant leur
autonomie de réplication, réarrangement de l’information par échange ou
addition de gènes d’origines variées, réarrangement par déplacement de gènes
d’un site à un autre (fig. 8).
Les changements de
la séquence d’un gène correspondent soit à la substitution d’une paire de
nucléotides par une autre, soit à la perte ou à l’insertion d’une paire de
nucléotides (ou même d’un segment de plusieurs paires). Ces changements ou
mutations se transmettent aux générations suivantes, elles sont héréditaires.
Quand ces mutations affectent le gène d’un ARNm, elles entraînent une
modification de la chaîne polypeptidique codée par ce gène; en effet ces
mutations provoquent le changement d’un ou plusieurs codons de l’ARNm et donc
le changement d’un ou plusieurs acides aminés dans la chaîne lors de la
traduction. Ce changement de la séquence des acides aminés de la chaîne
polypeptidique peut lui faire perdre ses propriétés biologiques: par exemple
ses propriétés catalytiques s’il s’agit d’une enzyme; on comprend ainsi que
certaines de ces mutations aient des conséquences plus ou moins dramatiques sur
le fonctionnement de l’organisme et de sa descendance (fig. 8 a).
La fréquence des
mutations géniques est normalement très faible, mais elle est augmentée par
certains agents physiques ou chimiques dits mutagènes: rayons ultra-violets,
radiations ionisantes, agents alkylants, peroxydes organiques, molécules
s’intercalant entre les paires de bases comme l’acridine. Il faut noter que la
plupart des agents mutagènes peuvent également rendre les cellules cancéreuses,
ils sont aussi cancérigènes.
L’introduction
d’informations nouvelles correspond soit à l’infection d’une cellule procaryote
ou eucaryote par un virus, soit à l’entrée dans une bactérie d’un plasmide
différent de ceux qu’elle possède déjà.
Un virus est une
particule constituée d’un acide nucléique (ADN ou ARN simple ou double brin)
qui est emballé dans une boîte protéique ou capside. La capside protège
l’information virale quand le virus est extracellulaire et permet en outre
l’entrée de cette information dans une cellule hôte. Les virus les plus simples
n’ont que 3 gènes, les plus complexes 250 environ. L’information virale qui a
pénétré dans une cellule est alors transcrite et traduite par les enzymes et
les ribosomes de l’hôte ce qui permet la synthèse de protéines de la capside et
d’acide nucléique viral. Ces constituants s’assemblent en nouvelles particules
virales qui sortent alors de la cellule hôte et peuvent à leur tour infecter
d’autres cellules. L’introduction d’information virale dans une cellule hôte
modifie donc son programme puisqu’elle synthétise alors des molécules qu’elle
ne produisait pas auparavant; selon les virus, cette modification de programme
entraîne ou non la mort de la cellule hôte (fig. 8 b).
Certains plasmides
peuvent être transférés d’une bactérie à une autre. Ces plasmides possèdent des
gènes qui, en s’exprimant dans la bactérie, entraînent la formation sur leur
membrane plasmique de tubes creux: les pili. Les plasmides passent alors d’une
cellule à l’autre par les pili selon un processus qui est la conjugaison, d’où
le nom de plasmide conjugatif qui leur est donné. La bactérie qui reçoit un tel
plasmide synthétise alors de nouvelles protéines, celles qui sont codées par
les gènes du plasmide (fig. 8 c). Les plasmides de résistance aux antibiotiques
possèdent des gènes codant pour des enzymes qui inactivent certains
antibiotiques; ces plasmides sont responsables de la résistance à ces
antibiotiques des bactéries qui les renferment. En transférant leurs plasmides,
ces bactéries ont la redoutable propriété de rendre résistantes les bactéries
de la même espèce qui ne l’étaient pas jusqu’ici et même de rendre résistantes
des bactéries d’espèces différentes, d’où la propagation de la résistance aux
antibiotiques dans les populations bactériennes, en particulier celles des
milieux hospitaliers.
Les échanges de
gènes entre deux molécules d’ADN ou l’addition de gènes à une molécule d’ADN
modifie l’information portée par ces molécules. Ces réarrangements sont des
recombinaisons, et les molécules d’ADN ayant subi ces modifications sont dites
recombinées. À la différence des gènes viraux et des plasmides dont nous avons
parlé plus haut et dont l’information se réplique indépendamment de celle
portée par les chromosomes nucléaires, les gènes échangés ou ajoutés par
recombinaison sont répliqués en même temps que la molécule d’ADN à laquelle ils
se sont intégrés.
Les échanges de
gènes se font au niveau de régions où les séquences nucléotidiques des deux
molécules d’ADN sont très voisines, ces régions sont dites homologues. Par
exemple dans les cellules diploïdes qui possèdent deux jeux de chromosomes
semblables, les échanges se font entre les ADN de deux chromosomes d’une même
paire. Lors de la méïose, phénomène qui à partir d’une cellule diploïde conduit
à la formation de quatre cellules reproductrices ou gamètes, de telles
recombinaisons sont fréquentes et ont été décrites depuis longtemps par les
Anglo-Saxons sous le nom de crossing-over.
L’addition de
nouveaux gènes à l’ADN d’un chromosome nucléaire se produit lors de l’infection
par certains virus; l’information virale s’intègre dans le cas à l’information
chromosomique au niveau d’un site bien précis de l’ADN et elle est répliquée en
même temps qu’elle. Selon les virus, l’information virale est ou non exprimée,
la régulation de cette expression étant encore très mal connue, comme c’est le
cas pour les virus oncogènes, virus qui transforment les cellules normales en
cellules cancéreuses. Par recombinaison leur génome s’intègre au génome
nucléaire; tant que le génome viral n’est pas exprimé la cellule reste normale,
lorsqu’il est exprimé, la cellule devient cancéreuse (fig. 8 d).
Le déplacement des
gènes d’un site à un autre est la transposition et les segments porteurs de
gènes transposables sont appelés transposons. À la différence des
recombinaisons, les transpositions se font dans n’importe quelle région de
l’ADN; découverte d’abord chez les procaryotes, on sait maintenant que la
transposition existe également chez les eucaryotes. Si l’insertion d’un
transposon se fait au milieu d’un gène, l’information portée par ce gène est
perdue puisque la séquence insérée modifie complètement celle du gène; mais si
le transposon quitte ensuite le gène pour aller vers un autre site, le gène redevient
normal. Là encore nous constatons que la transposition est un processus qui
peut modifier de façon réversible l’information cellulaire (fig. 8 e).
Il est possible
d’introduire dans des bactéries et même dans des cellules eucaryotes des ADN
recombinés, construits au laboratoire et qui changent alors l’information des
cellules. Cette ingénierie génétique utilise des techniques qui s’inspirent des
processus naturels que nous avons évoqués plus haut; elle offre des
possibilités extraordinaires comme la production industrielle d’hormones
peptidiques par des bactéries ou même la modification du génome d’une souris
par insertion de gènes dans l’œuf avant son développement.
4.
La cellule et son environnement
La cellule n’est
pas un système clos sans relations avec le milieu qui l’environne: bien au
contraire elle puise ou rejette dans le milieu extracellulaire des ions et des
molécules, contracte des relations avec ses voisines et même peut recevoir et
amplifier des signaux chimiques qui modulent son fonctionnement.
Échanges à travers
la membrane plasmique
La membrane
plasmique est perméable de façon sélective à certains ions et à certaines
molécules qui sont transportés de l’extérieur de la cellule vers le cytosol ou
dans le sens contraire. Les transports d’ions maintiennent le pH et la
composition ionique dans d’étroites limites afin que le milieu intracellulaire
soit le plus favorable aux activités enzymatiques. Les transports de molécules
permettent l’importation de matériaux de construction et de combustibles ou le
rejet de déchets. Ces transports mettent en jeu des constituants de la
membrane, en particulier des protéines; leur sens dépend des gradients de
concentration existant entre le cytosol et le milieu extracellulaire, il dépend
également pour certains d’entre eux de l’activité énergétique de la cellule.
Quand un transport se fait dans le sens du gradient, c’est-à-dire du milieu le
plus concentré vers le milieu le moins concentré, il s’agit d’un transport
passif; quand le transport se fait dans un sens opposé au gradient, on parle de
transport actif et dans ce cas la cellule dépense de l’énergie (fig. 9 a).
Les transports
passifs se font par diffusion à travers la bicouche lipidique pour l’oxygène,
le gaz carbonique et les substances liposolubles comme les acides gras,
l’alcool éthylique ou les dérivés du cholestérol. Pour l’eau et les ions Na+,
K+, C1-, la traversée de la membrane se fait par des canaux hydrophiles
constitués de protéines intégrées. Dans certains cas le transport passif de
molécules est effectué par des protéines ou des glycoprotéines spécifiques
appelées transporteurs qui les font passer rapidement d’une face à l’autre de
la membrane: un tel transport est une diffusion facilitée, c’est le cas par
exemple du glucose qui entre dans les globules rouges humains.
Les transports
actifs mettent en jeu des pompes membranaires qui sont formées de sous-unités
protéiques dont certaines sont glycosylées. Lors du transport il y a
phosphorylation d’une sous-unité de la pompe par l’ATP, puis déphosphorylation,
ces phénomènes entraînant des changements de conformation qui permettent à des
ions de franchir la membrane plasmique contre le gradient de concentration.
L’énergie nécessaire au transport est fournie par l’hydrolyse de l’ATP,
hydrolyse qui est catalysée par la pompe elle-même appelée pour cette raison
ATPase. L’ATPase membranaire la mieux connue est l’ATPase Na+, K+ dépendante
qui fait sortir 3 Na+ de la cellule en même temps qu’elle y fait rentrer 2 K+.
Le fonctionnement de cette pompe explique pourquoi le cytosol est toujours
pauvre en Na+ et riche en K+ alors que c’est le contraire dans le milieu
extracellulaire.
Certains transports
dépendent du gradient ionique qui est maintenu par le fonctionnement des pompes
membranaires. Par exemple dans les cellules absorbantes de l’intestin, le
glucose est transporté simultanément avec l’ion sodium; ce cotransport est
effectué par un transporteur membranaire protéique dont le fonctionnement est
couplé à celui de l’ATPase Na+, K+; après être rentré avec le glucose, le
sodium est rejeté dans le milieu extracellulaire par la pompe. Dans les
cellules absorbantes existent également des transporteurs qui réalisent le
cotransport des acides aminés et du sodium.
Endocytose,
exocytose
La cellule peut
prélever dans le milieu extracellulaire des molécules ou des particules qu’elle
emprisonne dans les poches qui se détachent de sa surface, ce phénomène est
l’endocytose (fig. 9 b). Il permet soit la capture de corpuscules de grande
taille dans des vacuoles de quelques micromètres de diamètre – c’est la
phagocytose – soit le prélèvement de gouttelettes de milieu extracellulaire
dans les vésicules de moins de 0,1 mm de diamètre – c’est la pinocytose. Lors
de l’endocytose il y a en général adsorption des particules ou des molécules à
la membrane plasmique par interaction avec des glycoprotéines membranaires qui
sont des récepteurs très spécifiques. L’invagination de la membrane et son
détachement de la surface mettent en jeu des filaments du cytosquelette et
consomment de l’énergie. Les matériaux capturés par endocytose sont parfois
stockés par la cellule qui les met en réserve, le plus souvent ils sont
digérés, les produits de la digestion étant utilisés par la cellule comme
matériaux de construction ou comme combustibles. Dans les vacuoles ou les
vésicules d’endocytose sont déversées des hydrolases contenues dans les
lysosomes, ceci par fusion de la membrane des lysosomes avec la membrane des
vacuoles ou des vésicules qui deviennent alors de véritables estomacs à
l’échelle cellulaire appelés vacuoles digestives.
La cellule est
également capable de décharger dans le milieu extracellulaire des produits
qu’elle a synthétisés et emballés dans des vésicules de sécrétion ou les
déchets qui n’ont pas été digérés dans les vacuoles digestives. Ce phénomène
est l’exocytose, (fig. 9 c), il correspond à la fusion de la membrane des
vésicules de sécrétion ou de la membrane des vacuoles digestives avec la
membrane plasmique.
Quelle que soit
l’importance de l’endocytose ou de l’exocytose, la surface cellulaire reste
constante grâce à un recyclage de surfaces membranaires. Il existe en effet un
équilibre entre ces deux phénomènes qui empêche que dans les cellules où la
phagocytose est intense leur membrane plasmique diminue de surface, ou que dans
celles où l’exocytose est élevée leur membrane augmente de surface.
Jonctions
intercellulaires
Dans les organismes
pluricellulaires, les cellules voisines ont souvent à leur surface des
dispositifs qui les maintiennent côte à côte ou qui leur permettent de
communiquer entre elles, ce sont les jonctions intercellulaires. Dans les
couches de cellules qui chez les animaux séparent deux compartiments et qu’on
nomme épithéliums, existent des jonctions qui assurent leur étanchéité. Ces
jonctions dites zonula occludens empêchent que les ions et les molécules
passent d’un compartiment à l’autre par les espaces intercellulaires. D’autres
jonctions – les desmosomes – sont des boutons adhésifs, d’autres enfin sont des
canaux intercellulaires qui permettent le passage d’ions et de petites
molécules d’une cellule à sa voisine, ce sont les jonctions communicantes (gap
junctions des Anglo-Saxons). Là encore on retrouve l’importance des protéines
dans les fonctions de la membrane plasmique, puisque toutes ces jonctions mettent
en jeu des protéines membranaires particulières. Dans les cellules végétales
les seules jonctions existantes sont les plasmodesmes par lesquels se font
d’une cellule à ses voisines des échanges d’ions et de molécules.
Réception de
signaux
Dans un organisme
pluricellulaire (dans le corps humain il y a environ 100 milliards de cellules)
les cellules communiquent entre elles afin que leurs activités soient
coordonnées et harmonisées. Les communications se font par des signaux
chimiques appelés médiateurs. Les uns parcourent des distances courtes, ce sont
les neuromédiateurs qui mettent en relation soit deux cellules nerveuses soit
une cellule nerveuse et une cellule musculaire, soit encore une cellule
nerveuse et une cellule glandulaire, ces cellules étant séparées l’une de
l’autre par un espace intercellulaire de 50 nm d’épaisseur ou moins; dans ces
cas, les communications s’établissent au niveau de régions spécialisées: les
synapses. D’autres médiateurs parcourent de longues distances (quelques millimètres
à quelques mètres selon la taille des organismes); ils sont sécrétés par des
cellules glandulaires et véhiculés par le sang: ce sont les hormones.
Quel que soit le
médiateur, le signal chimique qu’il représente est perçu par une cellule dite
cellule cible grâce à des récepteurs auxquels il se lie de façon spécifique. La
liaison médiateur-récepteur entraîne une cascade d’événements qui modifient
l’activité de la cellule cible.
Les médiateurs
hydrosolubles comme les hormones peptidiques ou les neuro-médiateurs ne
pénètrent pas dans les cellules cibles; ils se lient à des récepteurs de la
membrane plasmique qui sont des protéines intégrées ou périphériques (fig. 10
a). Selon le médiateur, la formation du complexe médiateur-récepteur provoque
soit l’activation d’une adénylate cyclase membranaire qui catalyse la formation
d’AMP cyclique (AMPc) à partir d’ATP, soit une entrée de calcium qui se fixe
sur une protéine membranaire ou intracellulaire: la calmoduline, soit encore
une entrée brutale de sodium. L’AMPc active une kinase qui phosphoryle
différentes enzymes dont les propriétés catalytiques sont alors activées. La
calmoduline qui a fixé du calcium active différentes kinases qui à leur tour
activent ou inactivent certaines enzymes. AMPc et calmoduline modifient donc
les activités biochimiques de la cellule cible de façon significative car il y
a amplification du signal perçu par le récepteur à la suite d’une cascade de
réactions enzymatiques.
L’entrée du sodium
provoquée par un neurotransmetteur provoque une dépolarisation de la surface
cellulaire; s’il s’agit d’une cellule nerveuse il y a propagation de cette
dépolarisation depuis la région synaptique sur toute la surface cellulaire;
s’il s’agit d’une cellule musculaire, la dépolarisation déclenche sa contraction.
Les médiateurs
solubles dans les lipides comme les hormones stéroïdes sont véhiculés dans le
sang par des protéines porteuses. Au niveau des cellules cibles ils diffusent
dans la bicouche lipidique de leur membrane plasmique puis se lient dans le
cytosol à un récepteur protéique spécifique (fig. 10 b). Le complexe
hormone-récepteur migre ensuite dans le noyau et là il stimule ou inhibe la
transcription de certains gènes. Dans ces conditions les activités de la
cellule changent car de nouvelles protéines sont synthétisées tandis que
d’autres ne le sont plus.
5.
Les conversions d’énergie par la cellule
Régénération
de l’ATP
Les cellules
consomment de l’énergie pour leurs différentes activités: biosynthèse de molécules,
production de mouvements, transports actifs; cette énergie est fournie par
l’hydrolyse de molécules d’ATP en ADP et phosphate inorganique. Dans ces
conditions les travaux cellulaires ne peuvent se poursuivre que si les
molécules d’ATP consommées sont régénérées par phosphorylation de l’ADP,
régénération qui demande de l’énergie; selon les cellules, cette énergie
provient soit de l’oxydation de combustibles, soit de l’énergie lumineuse du
soleil. Les combustibles quantitativement les plus importants sont le glucose
et les acides gras. Ces molécules sont désignées sous le nom de substrats du
métabolisme. Les oxydations qui permettent la régénération de l’ATP se font par
déshydrogénations successives, d’un substrat, l’hydrogène enlevé au combustible
étant transféré à un coenzyme nucléotidique d’une deshydrogénase: nicotine
adénine dinucléotide (NAD), flavine adénine dinucléotide (FAD), flavine adénine
mononucléotide (FMN).
Lorsque les
cellules disposent d’oxygène, le glucose et les acides gras sont entièrement
oxydés en gaz carbonique et eau; ces oxydations aérobies consomment de
l’oxygène et produisent du gaz carbonique, phénomènes qui caractérisent la
respiration. Dans ce cas l’oxygène est le dernier accepteur des hydrogènes
enlevés aux combustibles et il y a formation d’eau; quant au gaz carbonique, il
provient de réactions de décarboxylation qui se font au cours de la dégradation
du combustible. Chez les bactéries aérobies l’oxydation des combustibles se
fait dans le cytosol, chez les eucaryotes elle se fait dans divers
compartiments: cytosol puis matrice des mitochondries pour le glucose, matrice
mitochondriale et motrice des peroxysomes pour les acides gras.
Après avoir été
transférés sur des coenzymes nucléotidiques, les atomes d’hydrogène sont transportés
jusqu’à l’oxygène moléculaire par une chaîne de transporteurs dite chaîne
respiratoire, le long de laquelle se succèdent des oxydoréductions (fig. 11 a).
Les transporteurs de la chaîne respiratoire sont des molécules de la membrane
plasmique des bactéries aérobies ou des molécules de la membrane mitochondriale
interne des cellules eucaryotes; les unes transportent à la fois 1 proton et 1
électron, c’est à dire un atome d’hydrogène (quinones, deshydrogénases à FMN),
les autres ne transportent qu’un électron (cytochromes, protéines fer-soufre).
Compte tenu du positionnement asymétrique des transporteurs dans la bicouche
lipidique de la membrane, au cours du transport des électrons à l’oxygène il y
a simultanément translocation de protons: chez les bactéries, du cytosol vers
le milieu extracellulaire, chez les eucaryotes, de la matrice mitochondriale
vers l’espace situé entre les deux membranes de la mitochondrie. Cette
translocation crée à travers la membrane un gradient électrochimique de
protons, gradient qui exerce sur les protons une force tendant à les faire
revenir de l’autre côté de la membrane, force appelée par Peter Mitchell force
protomotrice.
Entraînés par la
force protomotrice, les protons traversent la membrane au niveau d’une ATPase
H+ dépendante. L’énergie libérée par le flux de protons qui traverse l’ATPase
permet la phosphorylation de l’ADP en ATP. C’est donc par l’établissement d’un
gradient de protons qui se fait le couplage entre l’oxydation des combustibles
et la phosphorylation de l’ADP, couplage qui est la phosphorylation oxydative.
En absence
d’oxygène, l’oxydation des combustibles est incomplète mais il y a néanmoins
phosphorylation de molécules d’ATP par des enzymes du cytosol. Le dernier
accepteur d’hydrogène est un produit de la dégradation des combustibles: pour
le glucose, l’acide pyruvique qui est converti en acide lactique par les
cellules musculaires insuffisamment oxygénées, ou en alcool éthylique par les
levures. Ces processus anaérobies sont des fermentations, leur rendement est
bien inférieur à celui de la respiration. La fermentation alcoolique d’une
molécule de glucose permet de régénérer 2 molécules d’ATP, son oxydation
complète par la respiration en régénère 36.
Chez les eucaryotes
photosynthétiques et les cyanobactéries, il se fait un transport d’électrons de
l’eau à un accepteur nucléotidique, le NADP, nicotine adénine dinucléotide
phosphate. Ce transport met en jeu une chaîne de transporteurs dite chaîne
photosynthétique (fig. 11 b); deux des réactions d’oxydoréduction se déroulant
le long de la chaîne sont des réactions photochimiques qui fournissent
l’énergie nécessaire au transport, car celui-ci ne peut se faire spontanément.
Chaque réaction photochimique met en jeu une molécule de chlorophylle piège qui
est excitée par l’énergie lumineuse qui est collectée par une antenne formée de
molécules de pigments (chlorophylle, caroténoïdes, etc.). L’ensemble
antenne-chlorophylle piège, ainsi que le donneur et l’accepteur d’électrons qui
lui sont associés forment un photosystème.
Les transporteurs
d’électrons (quinones, cytochromes, etc.,) et les deux photosystèmes, dits I et
II, de la chaîne photosynthétique sont des constituants de la membrane des
thylakoïdes. Au cours du transport des électrons de l’eau au photosystème II,
il y a dégagement d’oxygène et libération de protons dans l’espace
intrathylakoïde; pendant le transport des électrons du photosystème II au
photosystème I se fait simultanément une translocation de protons vers l’espace
intrathylakoïde; enfin deux protons du stroma pour les chloroplastes, ou du
cytosol pour les bactéries sont utilisés pour la réduction du NADP lors du
transport des électrons dans la dernière portion de la chaîne. Le transport des
électrons de l’eau au NADP entraîne donc la formation d’un gradient de protons
à travers la membrane des thylakoïdes; les protons ressortent de l’espace
intrathylakoïde par une ATPase H+ dépendante comparable à celle de la membrane
mitochondriale interne et à celle de la membrane plasmique des bactéries aérobies
et cette sortie de protons permet la régénération de l’ATP. Le couplage
énergétique entre les réactions photochimiques et la phosphorylation de l’ADP
est la photophosphorylation.
Chez les bactéries
la chaîne photosynthétique ne possède qu’un photosystème. Le premier donneur
d’électrons n’est pas l’eau, et il n’y a donc pas dégagement d’oxygène; selon
les espèces, ce donneur est l’hydrogène sulfuré, l’hydrogène ou le thiosulfate.
Le photosystème, les transporteurs d’électrons et l’ATPase H+ qui régénère l’ATP
sont des constituants membranaires de thylakoïdes.
Biosynthèses
La biosynthèse de
molécules consomme de l’ATP ou d’autres nucléosides triphosphates qui
proviennent tous de la conversion de l’ATP; elle nécessite aussi des réducteurs
nucléotidiques: NADH obtenus lors de la déshydrogénation de divers substrats,
NADPH produit par le cycle des pentoses dont les réactions mettent en jeu des
sucres à 5 carbones.Dans les cellules qui captent l’énergie lumineuse le
réducteur nucléotidique NADPH est produit par le fonctionnement de la chaîne
photosynthétique; la condensation d’une molécule de gaz carbonique avec un
pentose, le ribulose 1,5-diphosphate donne deux trioses, sucres à 3 carbones
qui sont à l’origine du glucose, synthèse qui consomme de l’ATP, du NADPH qui
est oxydé en NADP mais elle ne nécessite pas de lumière.
Production de
mouvements
La conversion
d’énergie chimique en énergie mécanique, c’est-à dire la production de
mouvements cellulaires est réalisée chez les eucaryotes par des glissements de
structures fibreuses du cytosquelette les unes par rapport aux autres:
glissements de filaments d’actine le long de filaments de myosine, glissements
de microtubules.
La myosine est une
protéine en forme de bâtonnet dont une des extrémités est renflée en une tête
globulaire qui possède une affinité pour l’actine et catalyse la dégradation de
l’ATP en ADP. Un filament de myosine est constitué de molécules assemblées
tête-bêche; en se fixant sur les têtes de myosine l’ATP est hydrolysé et les
têtes s’attachent à un filament d’actine; un changement de conformation
entraîne un basculement des têtes et par là même un déplacement du filament
d’actine par rapport au filament de myosine (fig. 12 a). La contraction des
cellules musculaires, les courants cytoplasmiques, la séparation des cellules
filles au cours de la cytodiérèse des cellules animales mettent en jeu de
telles interactions.
Le long de certains
microtubules sont attachées des molécules de dynéine dont les propriétés
rappellent celles des têtes de myosine. En présence d’ATP, ces molécules de 15
nm de long et de 5 nm de diamètre s’attachent à un microtubule voisin et en
pivotant le font glisser (fig. 12 b). Ces interactions sont à l’origine des
mouvements ciliaires ou flagellaires; les cils et les flagelles sont des
digitations de la surface cellulaire qui renferment un faisceau de
microtubules, l’axonème, dont la géométrie est très précise; quand la
digitation est courte par rapport à la taille de la cellule on parle de cil,
quand elle est longue on parle de flagelle. Grâce à la dynéine des interactions
se font entre microtubules de l’axonème, l’énergie libérée par l’hydrolyse de
l’ATP étant convertie en battement ciliaire ou en ondulation flagellaire.
6.
Applications médicales de la biologie cellulaire
La biologie
cellulaire non seulement permet de comprendre de mieux en mieux comment
fonctionne la cellule normale mais elle contribue aussi à une meilleure
interprétation de la cellule malade. On sait actuellement que certaines
maladies héréditaires humaines sont dues à des défauts ou à l’absence d’un
constituant moléculaire au niveau d’un organite particulier, nous en citerons
deux exemples: l’hypercholestérolémie familiale et le syndrome des cils
immobiles.
Chez l’homme, le
cholestérol, qui entre dans la composition des membranes ou qui sert à la
production d’hormones stéroïdes, provient pour une part de l’alimentation et
pour une part de sa synthèse à partir de l’acétate. L’essentiel de la synthèse
du cholestérol est réalisé dans les cellules du foie ou hépatocytes qui
reçoivent également le cholestérol d’origine alimentaire. Les hépatocytes
conditionnent le cholestérol dans des particules lipoprotéiques de 20 nm de
diamètre que transporte ensuite le plasma sanguin jusqu’aux autres cellules de
l’organisme. Ces cellules, ne synthétisant pas le cholestérol, capturent par
endocytose les particules lipoprotéiques qui leurs fournissent ainsi le
cholestérol dont elles ont besoin. Cette endocytose met en jeu des récepteurs
spécifiques glycoprotéiques qui reconnaissent les particules et sont
responsables de leur adsorption à la membrane plasmique avant que celle-ci ne
s’invagine. Chez les patients atteints d’hypercholestérolémie familiale ces
récepteurs spécifiques sont déficients et les particules lipoprotéiques ne se fixent
pas à la membrane plasmique. Les cellules de ces malades sont donc incapables
de capturer le cholestérol dont elles ont besoin, elles le synthétisent alors à
partir de l’acétate. Les particules lipoprotéiques riches en cholestérol
demeurent dans le sang ce qui explique le taux élevé de cholestérol dosé dans
le plasma; ce cholestérol se dépose en nodules dans le derme de la peau et dans
les tendons et forme en outre des plaques contre la paroi des vaisseaux
sanguins, ce qui peut entraîner leur obstruction. L’hypercholestérolémie
familiale est donc une maladie de la membrane plasmique.
Le syndrome des
cils immobiles, maladie humaine rare, est provoqué par une déficience de la
dynéine qui ne s’attache pas aux microtubules des cils et des flagelles, ce qui
entraîne leur immobilité. Dans ces conditions, le mucus sécrété par les voies
respiratoires et les sinus de la face est très mal évacué d’où bronchite et
sinusite chroniques; les cellules sensorielles olfactives ne sont plus
stimulables ce qui provoque une anosmie; enfin les hommes sont stériles car
leurs spermatozoïdes ne se déplacent pas. Le syndrome des cils immobiles est
donc une maladie de l’axonème.
Malgré ces succès
de la biologie cellulaire, il faut avancer pour comprendre parfaitement les
mécanismes qui régulent de façon harmonieuse le fonctionnement des divers
organites d’une même cellule et ceux qui régulent dans un même organisme le
comportement des cellules entre elles, leur mise en place et leur
différenciation au cours du développement embryonnaire. Les réponses à ces
questions permettent de mieux comprendre en particulier les mécanismes de la
cancérisation, le cancer étant une maladie de la régulation du fonctionnement
cellulaire.